Elle descend les escaliers, une valise à la main. Pas un regard, plus une parole. Elle n’a rien à ajouter. Elle n’a pas à se justifier. Aucun regret ne viendra la contrarier. Elle reprend sa liberté.

― Et Gaston ?

Elle me toise.

― Tu me vois ramener Gaston à Stéphane ?

Stéphane, c’est l’homme pour lequel elle me quitte. L’homme avec qui elle a pris du bon temps ces deux derniers mois. Son amant. Elle m’a annoncé qu’elle me quittait pour un autre homme comme elle m’aurait annoncé vouloir manger chinois. Une simple information. Elle n’a pas supplié mon pardon. Elle revendiquait presque son infidélité. Après tout, cela faisait quelques temps que j’étais distant avec elle. Ça ne datait pas d’hier. D’ailleurs, Stéphane n’avait pas été le seul. Ce n’était pas la première fois qu’elle me trompait. Des coups d’un soir, il y en avait eu plusieurs. Je devais m’estimer chanceux. Elle me rendait service en passant définitivement notre porte.

― Il n’a même pas fêté ses deux ans, je m’entends lui dire. Tu ne peux pas l’abandonner !

Justine soupire. Je l’ennuie. Elle a un homme à aller retrouver et je lui fais perdre du temps.

― On n’a qu’à faire un week-end sur deux.

L’eau me monte aux yeux. Je serre les dents. Gaston dort et j’imagine déjà, à son réveil, son regard inquiet et ses sourcils froncés. Il ne comprendra pas. Je ne comprends pas moi-même. Cette Justine là n’est plus celle que j’ai aimée. Elle ne l’est plus depuis longtemps. Je dois bien admettre qu’elle ne l’est plus depuis la naissance de Gaston… Celle dont je suis tombé amoureux n’aurait jamais abandonné son fils pour satisfaire au bon vouloir de son plan cul.

Elle passe la porte d’entrée puis claque la portière. La froideur de son cœur me laisse abasourdi. Le mien, fissuré, est en train de saigner.